Dân Chúa Âu Châu

Discours du pape aux jeunes (Traduction intégrale)

« Soyez des jeunes en marche, qui regardent l’ horizon, pas le miroir », exhorte le pape François devant 7000 jeunes qui ont rencontré les Pères synodaux le 6 octobre 2018, dans le cadre du Synode des évêques qui a lieu à Rome.

Après avoir assisté à deux heures de témoignages de jeunes aux vécus divers, le pape a reçu de leurs mains des questions, remises aux Pères synodaux qui les utiliseront pour leurs travaux. « Me trouver, a expliqué le pape en improvisant son discours, c’est faire, c’est aller à la recherche du bien, de la vérité, de la beauté. C’est là que je me trouverai. » Et d’ajouter : « si l’utilisation du web vous fait sortir de ce qui est concret, vous rend ‘liquide’, coupez-le. Coupez-le. Car s’il n’y a pas de concret, il n’y aura pas d’avenir pour vous. »

Le pape a fustigé « une Église incohérente, une Église qui vous lit les Béatitudes et puis tombe dans le cléricalisme le plus princier et le plus scandaleux ». « Si vous êtes chrétien, prenez les Béatitudes et appliquez-les », a-t-il insisté.

Comment vaincre la mentalité qui voit dans l’étranger, dans le différent, dans le migrant, un danger, le mal ? « On la vainc en embrassant, en accueillant, en dialoguant, par l’amour, qui est le mot qui ouvre toutes les portes », a aussi affirmé le pape au cours de cette veillée festive.

AK

Discours du pape François

Voici les questions écrites… Les Pères synodaux vous donneront les réponses. Parce que si je donnais les réponses ici, j’annulerais le Synode ! Les réponses doivent venir de tous, de notre réflexion, de notre discussion et, surtout, elles doivent être données sans crainte.

Je me limiterai – en ce qui concerne toutes ces questions – à dire quelque chose qui peut être utile, quelques principes.

A vous, jeunes, qui avez parlé, qui avez témoigné, qui avez parcouru un long chemin, je dis : c’est la première réponse. Faites votre chemin. Soyez des jeunes en marche, qui regardent l’ horizon, pas le miroir.  En regardant toujours devant vous, en marche, et non assis sur un canapé. Je dois souvent dire ceci : un jeune, un garçon, une fille, qui est sur un canapé, finit par prendre sa retraite à 24 ans : c’est moche, ça ! Et puis, vous l’avez bien dit : ce qui me fait me trouver n’est pas le miroir, regarder comment je suis. Me trouver, c’est faire, c’est aller à la recherche du bien, de la vérité, de la beauté. C’est là que je me trouverai.

Puis, sur ce chemin, un autre mot m’a frappé, c’est le dernier mot. Ce mot était fort, mais vrai… Qui l’a dit ? Toi. C’était fort : la cohérence. Être cohérent dans la vie. Je prends un chemin, mais avec une cohérence de vie. Et quand vous voyez une Église incohérente, une Église qui vous lit les Béatitudes et puis tombe dans le cléricalisme le plus princier et le plus scandaleux, je comprends, je comprends … Si vous êtes chrétien, prenez les Béatitudes et appliquez-les. Et si vous êtes un homme ou une femme qui a donné sa vie, vous l’avez consacrée ; si vous êtes prêtre – même un prêtre qui danse [se réfère à un témoignage] -, si vous êtes prêtre et voulez vivre en chrétien, suivez le chemin des Béatitudes. Pas le chemin de la mondanité, la voie du cléricalisme, qui est l’une des perversions les plus horribles de l’Église. Cohérence de vie. Mais vous aussi [il s’adresse aux jeunes], vous devez être cohérents dans votre voie et vous demander : « Suis-je cohérent dans ma vie ? ». C’est un deuxième principe.

Ensuite, il y a le problème des inégalités. On perd le vrai sens du pouvoir – cela vaut pour la question sur la politique -, on perd ce que Jésus nous a dit, que le pouvoir est un service : le vrai pouvoir est de servir. Sinon, c’est de l’égoïsme, c’est abaisser l’autre, ne pas le laisser grandir, c’est dominer, faire des esclaves, pas des gens mûrs. Le pouvoir c’est pour faire grandir les gens, pour être leurs serviteurs. Tel est le principe : tant pour la politique que pour la cohérence de vos questions.

Ensuite, d’autres questions… Je vais vous dire. S’il vous plaît, jeunes gens, garçons et filles, vous n’avez pas de prix ! Vous n’êtes pas de la marchandise que l’on met aux enchères! S’il vous plaît, ne vous laissez pas acheter, ne vous laissez pas séduire, ne vous laissez pas asservir par les colonisations idéologiques qui nous mettent des idées dans la tête et à la fin nous devenons esclaves, dépendants, des ratés dans la vie. Vous n’avez pas de prix : vous devez toujours vous le répéter : je ne suis pas aux enchères, je n’ai pas de prix. Je suis libre, je suis libre ! Éprenez-vous de cette liberté, qui est ce que Jésus offre.

Ensuite, il y a deux choses – et je voudrais terminer là-dessus – parmi les idées que vous avez émises et auxquelles les Pères synodaux répondront en dialoguant avec vos questions. La première concerne l’utilisation du Web. C’est vrai : l’interconnexion avec le numérique est immédiate, efficace, rapide. Mais si vous vous y habituez, vous finirez – et ce que je vais dire est réel – comme une famille où, à table, au déjeuner ou au dîner, tout le monde reste avec son téléphone portable et parle avec d’autres personnes, ou communique sur son téléphone portable, sans relation concrète, réelle, sans rien de concret. Tout chemin que vous prendrez, pour être fiable, doit être concret, comme les expériences, tant d’expériences que vous avez racontées ici. Aucun des témoignages que vous avez donnés aujourd’hui n’était « liquide » : ils étaient tous concrets. Du concret. Le concret est la garantie pour avancer. Si les média, si l’utilisation du web vous fait sortir de ce qui est concret, vous rend « liquide », coupez-le. Coupez-le. Car s’il n’y a pas de concret, il n’y aura pas d’avenir pour vous. C’est sûr, c’est une règle de la route, pour marcher.

Et puis, il y a l’accueil aussi, être concret dans l’accueil. Tant d’exemples que vous avez donnés aujourd’hui portent sur l’accueil. Michel a posé cette question : « Comment vaincre cette mentalité de plus en plus répandue qui voit dans l’étranger, dans le différent, dans le migrant, un danger, le mal, l’ennemi à chasser ? » Cette mentalité est une mentalité d’exploitation, on exploite les gens, on cherche à esclavager les plus faibles. ce n’est pas seulement fermer les portes, mais fermer des mains. Et aujourd’hui, les populismes sont un peu à la mode, ce qui n’a rien à voir avec ce qui est populaire. Populaire c’est la culture du peuple, la culture de chacun de vos peuples qui s’exprime dans l’art, s’exprime dans la culture, s’exprime dans la science du peuple, s’exprime dans la fête ! Chaque peuple fait la fête à sa façon. C’est cela populaire. Mais le populisme, c’est le contraire : c’est la fermeture sur un modèle. Nous sommes fermés, nous sommes seuls. Et quand on est fermé, on ne peut pas avancer. Faites attention. C’est la mentalité dont parlait Michel : « Comment vaincre la mentalité de plus en plus répandue qui voit dans l’étranger, dans le différent, dans le migrant un danger, le mal, le danger d’être chassé » ? On la vainc en embrassant, en accueillant, en dialoguant, par l’amour, qui est le mot qui ouvre toutes les portes.

Et à la fin – j’ai parlé de concrétude – chacun d’entre vous veut un chemin concret dans la vie, un chemin qui porte ses fruits. Merci à toi [Giovanni Caccamo] pour la photo avec ton grand-père : cette photo était probablement le plus beau message de cette soirée. Parlez avec les personnes âgées, parlez avec les grands-parents : ce sont les racines, les racines de votre concrétude, les racines de votre croissance, de votre épanouissement et de vos fruits. Rappelez-vous, si l’arbre est seul, il ne portera pas de fruit. Tout ce que l’arbre a en fleurs provient de ce qui est enterré dans le sol. Cette expression vient d’un poète, ce n’est pas la mienne. Mais c’est vrai. Accrochez-vous aux racines, mais ne restez pas là. Prenez les racines et cultivez-les pour donner du fruit, et vous aussi deviendrez des racines pour les autres. N’oubliez pas la photo, celle avec le grand-père. Parlez avec les grands-parents, avec les personnes âgées, ça vous rendra heureux.

Merci infiniment ! C’était des lignes directrices. Les réponses, à eux ! [il indique les père synodaux] Merci, merci, merci !

Traduction de Zenit, Océane Le Gall